L'initiation (Ndut)- Sobel Dione

LE RÔLE DE L'INITIATION EN AFRIQUE
Dans la formation du devenir humain, en Afrique au sud du Sahara, les rites tels que la circoncision , le massage du nouveau-né et le tatouage sont souvent utilisés à travers le mythe qui constitue l’origine même de ces pratiques. Les Nègres considèrent que les rites sont les principaux outils qui permettent de former les individus pour une meilleure socialisation. Rythmés de représentations sociales, ces rituels sont des processus de construction idéologique des sexes masculin et féminin pour les faire accéder à des qualifications éthiques et à des statuts sociaux supérieurs.
Ils sont également des étapes incontournables par lesquelles les novices doivent impérativement passer pour intégrer la structure sociale et d’affronter la vie. En effet, l’esprit des rites initiatiques masculin et féminin partent de l’idée selon laquelle cette pratique est la première manière de vouloir distinguer l’homme à la femme.
Dans la tradition africaine, de nombreux groupes ethniques croient qu’on ne devienne homme ou femme qu’après l’initiation. En milieu Diola, Sereer et Pulaar, ne sont considérés comme hommes que ceux qui ont subi l’opération du rituel d’initiation. Ces rituels réunissent souvent tous les jeunes garçons du village qui doivent subir l’opération.
Celle-ci est tenue en brousse (bois sacré) chez les Diola, « enclos de l’initiation ou le ndut » chez les Sereer, en retraite dans un lieu isolé chez les Pulaar. Elle s’effectue sous la supervision des initiés. Après le rituel, ces nouveaux initiés sont accompagnés d’un selbe, une personne chargée de les surveiller jusqu’à leur guérison totale.
Dans la culture Pulaar et Sereer, il est permis à ces jeunes garçons de sillonner les villages et de chasser des poules pour s’en servir de repas. Les jeunes filles évitent de les rencontrer pour ne pas subir de sanctions de leur part. Cependant, avec l’Islam force est de reconnaître que beaucoup de pratiques ont tendance à disparaître en milieu Pulaar. Mais, ils restent encore observés en pays Diola et Sereer. Le bukut (évènement de l’initiation masculine Diola) est considéré comme le seul et principal moment de former les hommes chez les Diola.
Une cérémonie de danse est organisée pour rythmer la fête. Les futurs initiés sont rasés par la famille maternelle ainsi que les cheveux gardés soigneusement afin qu’ils ne subissent les hantises des esprits maléfiques dans le bois sacré. À l’intérieur de ce dernier, les novices y restent pendant presque deux semaines avec les sages dans le but de les transmettre les secrets qui les permettent de devenir de véritables hommes à l’image de la culture Diola.

Au sortir, les nouveaux initiés peuvent se mariés et occuper de hautes responsabilités au sein de la structure sociale parce qu’en milieu Diola quel que soit l’âge biologique, le non initié est toujours considéré comme un mineur.

Le ndut (initiation masculine sereer) est également marqué par un cérémonial à l’instar de celui Diola. L’entrée dans le ndut est synonyme d’apprentissage et de formation pour devenir homme selon la tradition sereer. Le séjour dans le ndut (enclos et initiation) est ponctué par une série d’enseignements permettant aux jeunes initiés d’apprendre la gestion du social, la culture sereer et certaines chansons connues seulement des initiés. Ils subissent différentes formes de brimades, histoire de faire aussi l’expérience du malheur et de la douleur. La formation de l’homme sereer se fait au moment de l’initiation. Ils apprennent toutes les valeurs culturelles et confrontent la souffrance afin d’obtenir une certaine sagesse pour leur intégration dans la vie en société.
Le « ndut » apporte toujours un vent de bonheur dans les familles. C’est des moments de retrouvailles, de ripailles. Une fois de retour au village, une grande fête est organisée sur la place publique où chants et danses sont à l’honneur. Comme au premier jour, les initiés effectuent quatre fois le tours de l’arbre sacré devant toutes les populations toutes classes d’âges et sexes confondus. Des coups de fusil tonnent à tout va. Puis, place aux prières et aux remerciements. De retour dans leurs familles respectives, de grandes fêtes sont organisées en leur honneur. On ne lésine pas sur les moyens. Chacun, selon ses possibilités, immole bœufs, moutons, chèvres, volailles.
L’initiation, chez les sérères, est incontournable pour tout jeune qui aspire au respect. Quand ils reviennent, ils sont assurés d’être de vrais hommes et peuvent prétendre épouser une femme et sont aptes à assurer tout ce qu’un chef de famille doit faire. Un non-initié n’est pas considéré et accepté dans certains cercles. Il n’a pas le droit de s’asseoir et de parler avec les adultes de sa communauté. Quand il y a une réunion dans le village, il ne peut non plus y assister. De même, il doit forcément passer par l’initiation avant d’être considéré comme un homme.
En pays sérère, l’initiation est très bien organisée avec des rôles bien définis, Il existe une hiérarchisation qui comprend d’abord le « koumakh » qui est le chef suprême. Toutes les décisions émanent de lui. Ensuite vient le « kalma » qui est son second. Il y a aussi le « yayu njuli », la seule femme autorisée à être avec les initiés et qui est comme une mère pour eux.
À travers cette conception du rituel masculin dans la formation de l’homme, il est perçu par ailleurs de la même façon pour celle de la femme.
Le massage corporel du nouveau-né apparaît dans le même dynamique constructiviste de l’être humain. En Afrique, on pense que le massage est fondamental pour la formation anatomique, physiologique du développement corporel. Il fait sortir les formes biologiques du devenir de chaque sexe selon le choix de l’application qui lui est spécifiquement réservée. Cette manière d’entretenir le corps du bébé par le biais du massage permet de le préparer culturellement à affronter le monde réel et les représentations sociales qui tournent autour de son sexe. Ainsi, le sexe masculin, considéré comme celui qui doit confronter des activités physiques les plus dures, subit un massage qui lui permet de répondre à tout travail de ce genre. En revanche, le massage appliqué au corps de la fillette diffère à celui du garçon dans la mesure où le sexe féminin doit être modelé par une forme esthétique attractive afin de la permettre d’avoir une souplesse, douceur et rondeur des fesses pour séduire l’homme.
Article de l'historien et partenaire Mr Sobel Dione
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