Pointe de Sangomar

La pointe de Sangomar est une flèche littorale située sur l'océan Atlantique, au débouché du delta du Saloum, qui marque la fin de la Petite-Côte à l'Ouest du Sénégal.

 

Cet étroit banc de sable s'étend vers le Sud sur une vingtaine de kilomètres à partir de Palmarin-Diakhanor. Menacé de longue date par l'érosion côtière, le fragile cordon a été une nouvelle fois rompu par un raz-de-marée en 1987, donnant naissance à l'île de Sangomar. La brèche entre ce nouvel îlot et la pointe où se trouve le village de Djiffer continue de s'élargir.

 

Histoire

La pointe de Sangomar est aussi décrite depuis longtemps par les navigateurs et les ingénieurs hydrographes à cause de sa barre et en raison de sa position stratégique en aval du port de Kaolack, centre de production important pour l'arachide et le sel.

 

Au milieu du XIXe siècle, Faidherbe, alors gouverneur du Sénégal, cherche à prendre le contrôle des pays de l'arachide et à encercler le Cayor. Il mène notamment une expédition au Sine en mai 1859. Pour consolider les positions françaises, et comme à Rufisque (Cayor), Saly-Portudal (Baol), Kaolack (Saloum) et Joal (Sine), un fortin est construit à Sangomar. En 1890 on y édifie un poste de douane.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Pointe_de_Sangomar

 

Sangomar: les champs Élysées ou village des ancêtres des Séreer - Sobel Dione
Pendant des siècles, l’extrémité sud de la Petite-Côte sénégalaise, la pointe de Sangomar, a été un important lieu de culte pour les Sérères, qui vénéraient Roog, c’est-à-dire Râ. Bout de terre inhabité en face de l’île de Niodior.
Sangomar est considéré comme le lieu de rassemblement des djinns, mais aussi des Pangool : les esprits des ancêtres ; des ancêtres si accueillants que tout le monde les appelle affectueusement Mâmayiin : les grands-parents. C’est aussi Mâ-mayiin que les Sérères-Niominkas appellent la marée montante et, comme elle, les ancêtres reviennent toujours. Sangomar, c’est le royaume des ombres, les Champs-Élysées sérères, reliés au monde des vivants par un bras de mer.
Mort ou vif, nul n’est inaccessible ! dit-on en pays sérère. Les natifs qui partent volontairement des rives du Saloum reviennent tôt ou tard, rappelés par les Pangool, les esprits des ancêtres. Quant à ceux rappelés à Dieu, ils se fondent dans les ombres et rendent visite aux leurs. Faute de quoi, les vivants, nostalgiques, ils hissent la voile de l’amour à leur guise, naviguent jusqu’à Sangomar, où le roi des ombres ranime les morts et remédie à tous les soupirs.
D’après la légende, qui veut accéder à ses morts invoque le djinn de Sangomar et celui-ci le guidera, en vertu du pacte qui le lie aux ancêtres. Selon ce pacte, Sangomar nourrit, protège, couvre le peuple marin de ses bienfaits, en échange, celui-ci l’honore par des offrandes et le laisse emporter qui lui plaît, à l’heure de son choix, pour peupler son immense royaume. Sangomar règne sur le monde invisible, mais ses hôtes ayant généralement des missions à terminer ailleurs, ils ne se tiendraient pas tranquilles s’ils ne pouvaient continuer à communiquer avec les vivants. Quant à ceux qui n’arrivent pas à renoncer à leurs proches, otages de la marée basse – là-bas, derrière les bancs de sable du souvenir –, sans l’espoir de les voir revenir à la faveur d’une marée montante, beaucoup n’attendraient peut-être pas l’appel du Maître des flots pour aller les rejoindre. Ainsi, flux et reflux ! Conciliant, Sangomar permet le passage entre les deux mondes à ceux qui en expriment l’ardent désir, à condition que leurs ancêtres intercèdent en leur faveur. Et ils intercèdent souvent. Regardez l’abondante écume des vagues, chaque bulle renferme une âme ; depuis des siècles, les ancêtres débarquent ainsi sur les rivages du Saloum avec les dons de Sangomar et se retirent avec les doléances de leurs enfants. Flux et reflux : Sangomar prend et donne, à sa guise ! clament les vagues. En escale à Sangomar, les hôtes du djinn veillent, songeant à leur vie. Lassés du bavardage des vagues, comptent-ils patiemment les étoiles ? Non, ils parlent. Ensemble, ils parlent, mais ils s’adressent également à tout autre sachant les entendre. Devisant du crépuscule à l’aube, que disent-ils ? Lancent-ils des SOS ou murmurent-ils à la brise de quoi rassurer, consoler les vivants ? Sangomar brasse les souffles, mais il distingue chacune des voix et la fait parvenir au destinataire de son choix. Ceux qui l’invoquent ne veillent pas seuls. Nuits du Saloum ! Une Sérère vous jure, sur Roog Sen, qu’accommodant le dîner, seule dans sa cuisine, elle a entendu sa grand-mère morte depuis dix ans lui donner un conseil, ne riez pas, croyez-la. Elle ne rêve ni n’affabule, elle tient cette certitude multicentenaire de sa culture animiste, qui puisait sa lumière dans l’œil de Sirius – la religion sérère étant d’ailleurs représentée par une étoile à cinq branches, ainsi qu’une canne rainurée d’un serpent, telle celle d’Hippocrate. Nuits du Saloum ! Une vieille dame passe, traînant une cordelette en coton torsadée, rouge et blanc, qu’elle appelle Diambogne, ne riez pas ; avec l’aide de ses ancêtres, elle vous protège de la morsure mortelle d’un serpent. Merci vous coûtera moins qu’un cercueil, alors, dites-le poliment : Jook a njal . Et si vous doutez, sachez qu’au Saloum comme ailleurs, qui ne voit pas dans le noir peut s’abstenir d’affirmer qu’il n’y a rien à voir.
Source : Les veilleurs de Sangomar " Fatou Diome"
Article de l'historien Sobel Dione
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